jeudi 1 mai 2014

Penser librement ?

Dans un récent épisode parlementaire, nous avons vu combien il était difficile à certains députés de la majorité de revendiquer librement une opinion différente de celle du gouvernement sans s'attirer les foudres ministérielles et des petits caporaux en charge du bon ordre de l'armée majoritaire...
Menaces d'un autre temps.
Un homme ou une femme valent une voix.
Et rien n'oblige un député à conserver la même opinion au cours de son mandat ou à se plier à un ordre venu d'en haut. Cela s'appelle la démocratie et s'incarne dans la liberté et la responsabilité citoyenne.
La légitimité d'ailleurs de l'expression de ces députés, pouvait aussi se trouver dans l'impossibilité pour eux de retrouver dans le discours du premier ministre les promesses d'un certain candidat...
Jeu habituel.

On ajoutera que dans l'autre camp, certains auraient pu voter le projet s'il avait été proposé par leurs alliés.
Si je trouve bien ce que tu dis juste parce que tu es mon ami...
Le dialogue démocratique souffre de cette incapacité à dépasser des étiquettes qui ne veulent plus dire grand chose.
Nous peinons à nous débarrasser du vingtième siècle et la cinquième république ne répond plus aux exigences actuelles.
C'est un Monde qui change, où les vieilles recettes ne fonctionnent plus.
Il y eut autrefois des révolutions violentes qui venaient en réalité permettre par le changement de structures ou de gouvernement l'avènement d'autres révolutions qui n'étaient pas que philosophiques mais souvent techniques, industrielles, économiques.
Si au temps de Louis XVI on avança les valeurs et on eu raison de le faire, les intentions de la classe bourgeoise étaient surtout animées par un besoin de pouvoir développer son activité et son influence et non par le souci premier de permettre aux plus pauvres de s'émanciper... autrement que pour leur donner la possibilité de devenir les futurs "consommateurs" du vingtième siècle.
L'esclavage fut aboli parce qu'il choquait quelques uns mais surtout parce qu'économiquement la première industrialisation permettait de s'en passer et de lui substituer d'autres modes de production. Cela ne le rend évidemment pas moins indigne et affreux... et l'on voit où il perdure aujourd'hui...
Aujourd'hui, période intéressante où des mutations transforment le monde dans ses soubassements : révolution numérique, modifications des façons de penser, distorsions de l'espace et du temps, valeurs secouées...
Les réflexes conservateurs sont exacerbés de part et d'autre. Le capitalisme plus énervé que jamais développe ce qui pourrait s'apparenter à une révolution néo-libérale qui fait feu de tout bois.
Regardons l'exemple frappant de Facebook qui a su attirer et fidéliser beaucoup de monde quoiqu'on en dise et dans le même temps, développe des modèles économiques fort novateurs en permettant de relier et d'agréger entre elles des applications.... Publicité omniprésente et ciblée d'un consommateur géolocalisé et dont aucun geste n'échappe aux marchands.
Tout cela préserve une apparente liberté individuelle puisque personne n'est contraint de s'inscrire sur Facebook mais insidieusement comme la publicité télévisuelle a su devenir un fait culturel, les esprits plus malléables cèdent, adhèrent, croient, consomment...
Les écarts entre les plus faibles et les plus riches se sont accrus et la classe moyenne est appelée aujourd'hui plus qu'hier à faire tourner le système en particulier tout ce qui relève de la protection sociale...
Les plus faibles - mais plus seulement eux-  lorsqu'ils ne s'abstiennent pas, vont voter à l'extrême droite pensant y trouver là quelque revanche...
Ils n'ont évidemment pas lu le programme économique du Front National et restent peu informés des liens qui perdurent avec un passé qui ne fait pas honneur à la République.
Ajoutons la problématique de médias très dépendants du monde économique et qui travaillent dans l'urgence pour le sensationnel, l'incapacité pour la plupart des hommes politiques à dépasser le court terme de leur ré-élection qui devient leur seul projet, les ressources de la planète qui s'épuisent, les conflits nationalistes et religieux qui se multiplient dans un Monde où même le climat devient instable, il y aurait de quoi désespérer...
Pourtant :
- en étant un peu attentif notamment aux réseaux horizontaux et ouverts, on entend des voix qui proposent de nouvelles approches
- il est possible à chacun d'entre nous de s'engager non pas dans le sens classique d'antan où le militantisme pouvait aveugler.
Il faut admettre la complexité du Monde et des rapports entre les hommes. Les intérêts particuliers peuvent prévaloir sur l'intérêt collectif et au delà ce qui compte c'est de permettre aux plus faibles de prendre place dans la société sans s'enfermer dans la vision de l'assistanat.
Prenons un exemple : "Nouvelle Donne" développe l'idée qu'il est mieux de subventionner le travail que le chômage.
Cela veut dire quoi ?
Que l'on admet l'idée que le travail devient une denrée rare et plutôt que de payer certains à ne rien faire, il est mieux d'aider à maintenir l'emploi au sein des entreprises, pas "à tout prix" ou sans réfléchir, mais en se disant qu'il est mieux de partager et de demander à l’État de compenser et payer des travailleurs plutôt que des chômeurs.
On change de logique, de paradigme.
De même, si l'on considère qu'il est mieux que chacun s'engage à un moment de sa vie pour devenir un citoyen actif, alors, la politique ne doit plus être l'affaire d'une caste de professionnels... et dans le même esprit on peut voir l'intérêt du non cumul des mandats en quantité et dans le temps...
Face à de nombreuses difficultés que nous rencontrons, il faut "faire autrement", agir, non pas en tentant des modèles qui n'ont pas marché, non pas en fermant portes et fenêtres et en laissant croire que c'était mieux avant, mais en posant l'idée que nous avons le droit d'imaginer un projet collectif et de rechercher ensemble des solutions dans un esprit coopératif.
C'est cela qu'il faut retrouver.
Cet élan du projet : exactement comme au sein d'une famille on ose se donner un projet qu'il soit professionnel, de grand voyage, de création d'une maison, d'une entreprise ...
Mais ce projet n'a de chance de réussir que si nous y croyons, non pas de manière irrationnelle mais parce qu'il nous permet d'exprimer des valeurs.
Nous avons beaucoup à puiser en énergie dans les valeurs de solidarité, de coopération...
Ces valeurs sont plus enrichissantes que les valeurs mortifères de l'argent que l'on consomme ou que l'on spécule...
En réalité, nous savons cela, nous en avons la conviction intime, mais nous n'avons pas encore le courage collectif de l'exprimer tant la pensée unique (Front National inclus) nous enferme dans une approche fataliste où il s'agirait juste de tenter de préserver au mieux ses acquis...
Cette logique ouverte, généreuse et dynamique... ne demande pourtant que notre assentiment et notre présence active.

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