samedi 27 septembre 2014

l'auto-oppression

Ça râle, ça proteste, ça dénigre, ça conspue, ça crie au scandale et pousse des cris d’orfraie à la moindre velléité de réformette... mais ça ne se révolte pas.

Les descentes dans la rue ne demandent que "de renoncer à" et l'on ne propose guère...

On fait des marches blanches, mais on ne sait plus faire acte de solidarité dans le simple quotidien.

Chacun dans sa chacunière pense doctement ce que lui dictent les sondages.
On consomme.
On attend que service soit rendu et au plus vite.
On dénigre le service public mais on ne veut pas payer d'impôt.
On a confiance en rien ni personne...
On a peur des terroristes mais cela fait un ennemi de plus pour nourrir la détestation.
On a mal au siècle mais on veut ignorer l'Histoire.
On réagit sur le vif mais on passe vite à la page suivante, on ne s'attarde pas, on ne projette plus, on trouve même des excuses dans l'incertitude pour laisser faire ou laisser dire à notre place les pires mots pour occuper l'espace de notre vacuité désespérée.

On est "petits propriétaires" et notre opinion se forge aux lieux communs du Scandale.

Les chefs d'Etat qui ne peuvent plus décréter la mobilisation générale comme en 14, organisent au bout du Monde des guerres par procuration où meurent de vrais hommes, comme de vrais morceaux de fruits dans un yaourt, on manifeste un peu, on pleure vaguement puis on passe à autre chose...

Un vieux Monde qui ne finit pas de finir et de fondre sous le réchauffement climatique.
Mais tout cela ne semble pas assez grave, nous avons besoin d'aller dans le mur peut-être pour réagir.
Nous sommes si vieux dans ce monde déjà périmé.

Des drones passent au dessus de nos têtes.
Tout nous piste en puces électroniques, en géolocalisation...

Les réseaux diffusent horizontalement un savoir que seuls les experts savent trier.
Nos enfants s'insultent sur Internet et l'on utilise Facebook pour la pire loi du Talion.

Sur ce fumier de notre découragement les petits fascistes ordinaires prospèrent.
Ils dénient le droit d'être à celui qui ne se conforme pas à la prétendue tradition.

Plus que jamais en interaction inter-reliés dans une sorte de vaste dépression Mondiale, si demain nous retrouvions l’enthousiasme pourrait-il être autre chose que le fruit manipulé par une vaste campagne conjointe de Coca-Cola et de Mac Donald ?

Nous avons bâillonné les poètes.
Même les écrivains s'emmerdent dans leurs propres romans.

Etre heureux serait suspect.

Et ça picole, ça fume, ça brûle des joints sous le nez de la police qui pose des radars sur les autoroutes où nous continuons de foncer en critiquant ces radars qui ne nous laissent même plus nous tuer librement et mettre un peu de sang et de sensations dans la tôle froissée.

Nous le voyons bien que ce monde ne va pas, mais nous n'osons pas encore imaginer autre chose, encore moins reprendre la main.
Nous avons peur de la réaction des autres mais plus encore de ce que nous serions capables de faire, si demain nous osions sortir du prêt à penser et de l'auto-oppression où nous nous évertuons à rester...

Ce qui nous fait une excuse.
Cela fait tellement de bien de pouvoir se plaindre !
   

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