mardi 2 novembre 2010

les machines à exclure

Nous fabriquons tous des machines à exclure, souvent malgré nous.
Si le pouvoir et le savoir dire "non" permettent de préserver notre liberté individuelle, notre vie sociale, professionnelle, familiale, culturelle est souvent sous l'emprise de machines à exclure.
Ces machines, nous en sommes les agents... plus souvent d'ailleurs les employés que les concepteurs...
Marqueurs identitaires, repères, technicité, rites professionnels, espaces culturels et commerciaux... nous fabriquons sans cesse des signes dont la portée symbolique est censée préfigurer notre valeur supposée...
Nombre de sociologues ont décrypté ces langages, ces codes. Ces machines à exclure servent parfois des systèmes qui tout en semblant s'opposer peuvent s'alimentent réciproquement et trouver dans l'exclusion affichée de l'autre, la logique de leur propre démarche.
Tout cela n'est pas forcément construit ni prémédité, l'élitisme peut se vouloir républicain (il n'en est pas moins élitisme), la volonté de nuire n'est pas forcément première...
Des machines à exclure, la pire est celle de "l'auto-exclusion" où l'on s'interdit d'approcher notamment des espaces de connaissance ou des territoires sociaux parce que l'on se pense indigne, inculte, incapable...
Chacun a connu la crainte à franchir la porte de certains grands restaurants - la censure du porte monnaie est évidente - mais combien se souviennent qu'il peut être encore plus violent pour certains d'entrer dans une librairie ou même une bibliothèque pourtant gratuite ?
De ces constats, qu'il faut creuser pour les partager, le plus difficile est celui qui consiste à mesurer que nous fabriquons de l'exclusion comme nous pouvons la subir.
Le spécialiste dans son cabinet, l'enseignant dans sa classe, moi même en écrivant ces mots, nous fabriquons souvent de l'exclusion qu'elle soit "explicite" ou implicite...
Il ne s'agit pourtant pas de se culpabiliser.
Je dois d'abord comprendre la violence engendrée par la machine à exclure mais je dois surtout relire ce qui dans ma propre vie peut exclure autrui.
Il me faut ensuite fabriquer de la clarté, expliquer, traduire, simplifier partout où cela est possible... mieux dire c'est aller vers l'autre... mais il faut aussi que j'aide l'autre à prendre conscience qu'il peut s'emparer de mon savoir et apprendre avec moi... Je vais céder un peu de pouvoir, mais je vais gagner en stature, en affirmation non violente, en autorité (c'est à dire en capacité à s'affirmer sans contraindre).
Cela suppose sans naïveté de croire en l'autre, de croire en soi, de lutter pied à pied contre la violence et contre d'autres machines qui nuisent à notre vie et dont pourtant nous fournissons aisément le carburant : "les machines à stresser".

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